Les enjeux de la transformation numérique des territoires

Stéphane Menu

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Les enjeux de la transformation numérique des territoires

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Le gouvernement a récemment présenté les conditions d’allocation des 88 millions d’euros du plan de relance dédiés à la transformation numérique des territoires. L’État assurera le financement de projets de taille critique, des études ou des formations, en lien avec les collectivités.

C’est en liaison avec les associations d’élus que les conditions d’octroi de l’enveloppe dédiée à la transformation numérique des collectivités territoriales ont été imaginées. Amélie de Montchalin, ministre de la Transformation et de la fonction publiques, et Jacqueline Gourault, ministre de la Cohésion des territoires, en ont détaillé les modalités.

Dans les faits, les projets de taille critique feront l’objet d’une attention plus grande

Ces financements visent à « soutenir des projets numériques qui ont un impact concret dans la vie des citoyens, pour faciliter leurs démarches administratives locales, pour les faire participer à la vie des territoires, et faciliter l’exercice des missions des agents des collectivités territoriales et des élus au quotidien ». Dans l’absolu, toutes les collectivités peuvent en bénéficier. Dans les faits, les projets de taille critique feront l’objet d’une attention plus grande. En effet, les projets éligibles devront concerner un bassin de vie d’« environ 500 000 habitants » ou s’appuyer sur la taille départementale.

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Projets mutualisés

Les collectivités petites et moyennes n’auront droit qu’à une prise en charge d’études ou de formations dont les préfets jugeront de la pertinence et donc du financement. Les aides automatiques, accessibles à toutes les collectivités dont la taille est un critère d’obtention, ne seront accordées que pour la mise en place de connecteurs France Connect (ou autres API de l’État).

Si les principes de la démarche étaient connus, il manquait encore l’étape du détail de la répartition des crédits

Des projets mutualisés, atteignant la taille critique en termes de nombre d’habitants, pourront être conçus vie une « plateforme de coconstruction de solutions numériques » destinée aux collectivités. Si les principes de la démarche étaient connus, il manquait encore l’étape du détail de la répartition des crédits, tâche à laquelle les deux ministres se sont attelées.

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Au soutien des grandes politiques publiques

30 M€ sont ainsi dévolus à la « coconstruction des projets ». Les projets déjà ébauchés seront examinés et ceux qui s’inscrivent dans le cadre des grandes politiques publiques seront priorisés : Cœur de ville, Petites Villes de demain, Agenda rural, quartiers prioritaires. Un calendrier a été arrêté : recueil des besoins d’ici fin mars, vote des collectivités pour sélectionner les projets en avril. Les candidatures pourront alors être déposées pour une mise en œuvre dès cet été. Ce calendrier très serré s’explique par le fait que l’État entend en profiter pour « booster » les projets de services incubés au sein de l’ANCT (adresse, prise de RV…).

34 millions d’euros permettront aux préfets de venir en aide aux petites et moyennes collectivités

Trois vagues d’appels à projets d’un montant de 24 M€ seront lancés en 2021 et 2022 pour améliorer la dématérialisation ou rendre plus qualitative l’ergonomie des téléservices déjà en place. La mise aux normes d’accessibilité handicapés, la création de portails citoyens territoriaux ou encore la prise en compte des remarques des usagers seront subventionnées à hauteur de 50 %, toujours dans un département et/ou dans un bassin de vie de 500 000 habitants. Le cycle de vie de la donnée (développement d’API, ouverture des données, archivage…), les coopérations locales d’acteurs publics et privés (insertion, formation, culture…) pourront aussi être financés.

La métropole nantaise, entre numérique et flyers
Nantes Métropole se caractérise par son dynamisme en termes de communication numérique. Mais, comme le précise Xavier Crouan, DGA et directeur général à l’information et à la relation au citoyen, « la crise sanitaire nous a appris beaucoup de choses en la matière ». Dans un sondage post-premier confinement, « 43 % des habitants métropolitains ont confirmé avoir eu un accès plus important à internet, pour des raisons évidentes, liées au télétravail, au click and collect, etc. En même temps, le constat d’une fracture numérique s’est confirmé très clairement, pas uniquement en termes d’équipement informatique, mais aussi de connexion, qui a un coût, et de difficulté du rapport à l’écriture, à la maîtrise de l’écosystème internet. Pour des raisons écologiques, nous avions cessé de diffuser nos informations habituelles sur papier, les affichettes, etc. Or, nos antennes CCAS nous ont informées qu’ils craignaient qu’un partie de la population soit sortie des radars. Nous sommes donc revenus aux flyers diffusés dans toutes les boîtes aux lettres et autres affichettes dans les halls d’immeubles et la fréquentation des CCAS est repartie à la hausse », assure-t-il.

Le métier d’agent d’accueil change radicalement
Xavier Crouan en a conclu d’évidence : « Nous devons informer tout le monde. Nous devons mixer les deux modes de communication ». Sur le site de la métropole, une centaine d’e-services sont proposés. L’appli « Nantes dans ma poche » compte 140 000 abonnés sur 600 000 habitants. Une réelle performance ! Mais la transition numérique ne doit laisser personne sur le côté. Ainsi, la métropole est en train de révolutionner le métier d’agents d’accueil. Ces derniers sont formés pour non seulement recevoir les personnes mais aussi établir un diagnostic sur leur situation et les accompagner dans leurs démarches, surtout lorsqu’elles comportent un volet numérique, ce qui est assez généralisé. « Cet accompagnement au changement est absolument nécessaire. Il concerne Nantes mais aussi toutes les communes de la métropole », conclut-il.

Laboratoire d’innovation territoriale

34 millions d’euros permettront aux préfets de venir en aide aux petites et moyennes collectivités pour les accompagner dans leur transformation numérique. Les subventions obtenues donneront la possibilité de réaliser un diagnostic, d’établir une stratégie ou de former les agents. Les critères arrêtés pour bénéficier d’un financement sont l’ampleur du portage, la valeur de l’équipe projet, l’impact direct ou induit du projet. Pour finir, 4 M€ seront dédiés à la création de « laboratoires d’innovation territoriale ».

Il faut aller au contact physique des gens pour leur parler numérique

Tirer les leçons de la crise sanitaire

« Il est indispensable de soutenir les collectivités à l’heure où la crise sanitaire met en évidence la fracture numérique dans notre hexagone. Par exemple, l’inscription à la vaccination est une véritable catastrophe. Si ces financements permettent aux villes d’afficher une meilleure intelligence numérique, ça permettra tout simplement de sortir les gens de l’isolement, voire de sauver certaines vies. Il est clair à ce jour que le numérique permet le renforcement du lien social. Il faut aller au contact physique des gens pour leur parler numérique. Il est prévu d’embaucher 4.000 conseillers numériques pour faire ce travail, directement installés dans les collectivités, notamment dans le rural et les quartiers de la politique de la ville, soit environ 20.000 communes relevant de ces classifications. Autant dire qu’il y aura du pain sur la planche pour ces nouveaux emplois », confie Florence Durand-Tornare, fondatrice et déléguée générale de l’association Villes Internet.

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