Insee Analyses Auvergne-Rhône-AlpesLogement social et pauvreté : deux facteurs de mobilité des quartiers politique de la ville

Jean Geymond, Aline Labosse (Insee)

Début 2015, la région Auvergne-Rhône-Alpes compte 140 quartiers prioritaires de la politique de la ville. Les habitants de ces quartiers ont été plus mobiles que ceux vivant dans leur environnement proche entre 2015 et 2016. Les personnes quittant un quartier emménagent majoritairement hors d’un quartier prioritaire. L’implantation du parc social conditionne une grande partie des déménagements vers et depuis ces quartiers. Les situations familiales, et en particulier la monoparentalité, jouent également un rôle important dans ces déménagements. Ces quartiers accueillent des populations fragiles économiquement et laissent partir des ménages plus aisés que ceux qui y vivent déjà. Pour autant, la pauvreté caractérise aussi les sortants. Ainsi, au jeu des migrations résidentielles, la majorité des quartiers s’appauvrissent.

Insee Analyses Auvergne-Rhône-Alpes
No 90
Paru le :Paru le12/12/2019
Jean Geymond, Aline Labosse (Insee)
Insee Analyses Auvergne-Rhône-Alpes No 90- Décembre 2019

Depuis la redéfinition de la géographie d’intervention de la politique de la ville en 2015, la région Auvergne-Rhône-Alpes compte 140 quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) parmi les 1 296 situés en France métropolitaine. Ces quartiers rassemblent environ 400 000 personnes, soit 5 % de la population régionale (figure 1). Ils concentrent, par définition, une population aux fragilités économiques prononcées. Les revenus y sont plus faibles que dans les unités urbaines dans lesquelles ces quartiers s’insèrent et que dans le reste de la France métropolitaine. La pauvreté est plus marquée car les familles monoparentales et les jeunes y sont proportionnellement plus nombreux. Or, ces populations sont souvent plus vulnérables socialement.

L’un des enjeux majeurs de la politique de la ville est d’accroître la mixité sociale de ces quartiers afin d’en réduire la ségrégation spatiale et sociale. Dans cette optique, les mobilités résidentielles peuvent être un levier d’action important, du fait des possibles différences de profil entre les entrants et les sortants. L’analyse des mobilités résidentielles permet d’appréhender leur influence dans l’évolution du profil des quartiers.

Figure 1Une majorité de QPV dans les grandes unités urbainesRépartition des QPV au sein des unités urbaines d’Auvergne-Rhône-Alpes

Une majorité de QPV dans les grandes unités urbaines
code Libellé Type de quartier
QP001001 Grande Reyssouze Terre Des Fleurs Quartier HLM de petite unité urbaine
QP001002 Croix Blanche Quartier HLM de petite unité urbaine
QP001003 Quartier Jacques Prévert Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP001004 Levant - Tattes Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP001005 Les Courbes De L'Albarine Quartier HLM de petite unité urbaine
QP001006 La Plaine - La Forge Quartier HLM de petite unité urbaine
QP001007 Pré Des Saules Quartier HLM de petite unité urbaine
QP001008 Brillat - Savarin Quartier HLM de petite unité urbaine
QP001009 Maladière Quartier périphérique de petites adresses
QP003001 Coeur D'Agglo Centre ancien
QP003002 Les Ailes Quartier HLM de petite unité urbaine
QP003003 Moulins-Sud Quartier HLM de petite unité urbaine
QP003004 Rive Gauche Centre ancien
QP003005 Fontbouillant Quartier HLM de petite unité urbaine
QP003006 Bien-Assis Quartier HLM de petite unité urbaine
QP007001 Le Contrat Ville Des Quartiers D'Avenir D'Aubenas Centre ancien
QP007002 Coeur De Ville Quartier périphérique de petites adresses
QP007003 Sud Avenir Quartier périphérique de petites adresses
QP007004 Les Hauts De Ville Quartier HLM de petite unité urbaine
QP007005 Nouvel Horizon Quartier HLM de petite unité urbaine
QP015001 Aurillac Sud Quartier HLM de petite unité urbaine
QP026001 Centre Ancien Centre ancien
QP026002 Quartiers Ouest Quartier HLM de petite unité urbaine
QP026003 Nocaze Quartier HLM de petite unité urbaine
QP026004 Centre Ancien Centre ancien
QP026005 Quartier Est Quartier HLM de petite unité urbaine
QP026006 Polygone Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP026007 Les Hauts De Valence Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP026008 Valensoles Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP026009 Chamberlière Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP026010 Le Roc Quartier HLM de petite unité urbaine
QP026011 Coeur De Loriol Quartier périphérique de petites adresses
QP026012 Clairval Quartier HLM de petite unité urbaine
QP038001 La Luire - Viscose Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP038002 Champaret Quartier HLM de petite unité urbaine
QP038003 Essarts - Surieux Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP038004 Village Sud Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP038005 Alpes Mail Cachin Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP038006 Mistral Lys Rouge Camine Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP038007 Villeneuve - Village Olympique Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP038008 Teisseire Abbaye Jouhaux Châtelet Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP038009 Alma - Très Cloîtres – Chenoise Quartier périphérique de petites adresses
QP038010 Iles De Mars Olympiades Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP038011 Renaudie - Champberton - La Plaine Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP038012 Brunetière Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP038013 Champfleuri Quartier HLM de petite unité urbaine
QP038014 Saint Hubert Quartier HLM de petite unité urbaine
QP038015 Saint Bonnet Quartier HLM de petite unité urbaine
QP038016 Les Roches Quartier HLM de petite unité urbaine
QP038017 La Plaine Quartier HLM de petite unité urbaine
QP038018 Vieux Péages - Les Ayencins Quartier périphérique de petites adresses
QP038019 Route De Sablons Quartier périphérique de petites adresses
QP038020 Belmont Moulin Villette Quartier HLM de petite unité urbaine
QP038021 Barbières Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP038022 Plan Des Aures Quartier HLM de petite unité urbaine
QP038023 Estressin Quartier HLM de petite unité urbaine
QP038024 Vallée De Gère Centre ancien
QP038025 Les Genêts Cancane Charlemagne Centre ancien
QP038026 Malissol Quartier HLM de petite unité urbaine
QP042001 Beauregard Quartier HLM de petite unité urbaine
QP042002 La Chapelle Quartier HLM de petite unité urbaine
QP042003 La Romière Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP042004 Montrambert Méline Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP042005 Le Dorlay - Les Pins - La Bachasse Quartier périphérique de petites adresses
QP042006 Montcel - Centre Ville Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP042007 Grand Pont Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP042008 Centre Ville Centre ancien
QP042009 Centre Ville Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP042010 St Julien - Crêt De L'Oeillet Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP042011 Cotonne Montferré Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP042012 Tarentaize Beaubrun Centre ancien
QP042013 Montreynaud Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP042014 Crêt De Roc – Soleil Centre ancien
QP042015 Quartiers Sud-Est Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP042016 Terrenoire Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP042017 Bourgogne Quartier HLM de petite unité urbaine
QP042018 Le Parc Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP042019 Mayollet Centre ancien
QP043001 Val Vert Quartier HLM de petite unité urbaine
QP043002 Guitard Quartier HLM de petite unité urbaine
QP063001 Molles Cizolles Quartier HLM de petite unité urbaine
QP063002 Saint-Jacques Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP063003 Quartiers Nord Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP063004 La Gauthière Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP063005 Fontaine Du Bac Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP063006 Cournon D'Auvergne Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP063007 Centre Ancien Centre ancien
QP069001 Périmètre Nord De Ville Quartier HLM de petite unité urbaine
QP069002 Monod Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP069003 La Source Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP069004 Centre Quartier périphérique de petites adresses
QP069005 Les Pérouses Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP069006 Le Garet Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP069007 Béligny Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP069008 Belleroche Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP069009 Aiguerande Quartier HLM de petite unité urbaine
QP069010 Parilly Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP069011 Terraillon - Chenier Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP069012 Les Vernes Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP069013 La Saulaie Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP069014 Hautes Roches Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP069015 Minguettes - Clochettes Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP069016 Arsenal - Carnot-Parmentier Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP069017 Les Collonges Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP069018 Grande Île Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP069019 Sud Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP069020 Duclos - Barel Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP069021 Les Buers Sud Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP069022 Bel Air - Les Brosses Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP069023 Saint-Jean Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP069024 Les Buers Nord Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP069025 Tonkin Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP069026 Prainet Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP069027 Le Mathiolan Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP069028 Ville Nouvelle Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP069029 Bellevue Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP069030 Garibaldi Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP069031 Bel Air Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP069032 Soeurs Janin Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP069033 Cités Sociales Gerland Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP069034 Moulin A Vent Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP069035 Etats-Unis - Langlet Santy Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP069036 Mermoz Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP069037 Duchère Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP069038 Loucheur - Gorge De Loup Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP069039 Les Plaines Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP069040 Vallon Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP069041 Le Vergoin Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP069042 Moncey Centre ancien
QP069043 Les Plantées Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP073001 Biollay - Bellevue Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP073002 Les Hauts De Chambéry Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP073003 Marlioz Quartier HLM de banlieue éloignée de grande unité urbaine
QP073004 Val De Roses - Contamine Quartier HLM de petite unité urbaine
QP074001 Le Perrier - Château Rouge – Livron Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP074002 Le Chalet - Helvetia Park Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP074003 Les Ewües Quartier HLM de petite unité urbaine
QP074004 Collonges Sainte-Hélène Quartier HLM de petite unité urbaine
QP074005 Saint Georges - Route De Thairy Quartier HLM périphérique de grande unité urbaine
QP074006 Bois Jolivet - Les Iles - Bellerive Quartier HLM de petite unité urbaine
  • Champ : unités urbaines contenant au moins un QPV en Auvergne-Rhône-Alpes
  • Source : CGET, Observatoire National de la Politique de la ville (ONPV)

Figure 1Une majorité de QPV dans les grandes unités urbainesRépartition des QPV au sein des unités urbaines d’Auvergne-Rhône-Alpes

  • Champ : unités urbaines contenant au moins un QPV en Auvergne-Rhône-Alpes
  • Source : CGET, Observatoire National de la Politique de la ville (ONPV)

Un habitant en QPV sur huit a déménagé

Au cours de l’année 2015, 12,5 % des habitants en QPV ont déménagé et 7,7 % ont quitté un QPV pour s’installer dans un quartier qui n’est pas un quartier de la politique de la ville. Ces taux de mobilité sont, dans les deux cas, légèrement plus élevés que la moyenne de l’ensemble des QPV de France métropolitaine (+ 0,6 et + 0,7 point).

De manière générale, Auvergne-Rhône-Alpes se place parmi les régions ayant les taux de déménagement les plus importants de France métropolitaine. Les environnements urbains de ses quartiers, c’est-à-dire le reste de l’unité urbaine qui les englobe (définitions), ont vu 11,2 % de leurs habitants emménager dans un autre logement, soit 0,3 point de plus que la moyenne nationale.

Les mobilités observées en QPV sont relativement plus importantes que celles des environnements urbains qui les entourent. Elles ne correspondent pas toujours à une réelle intention de mobilité des individus qui y vivent. Elles peuvent être contraintes suite à une opération de rénovation urbaine, ou à destination d’un espace géographique non désiré, mais offrant d’autres avantages (taille du logement en adéquation avec le profil familial, accès aux écoles, etc.).

Habiter en QPV n’a pas d’influence directe sur la propension à changer de logement. C’est le statut d’occupation du logement qui prime. Propriétaires, locataires du parc social et locataires du parc privé déménagent dans des proportions identiques, qu’ils habitent initialement dans un QPV ou dans l’environnement urbain. Entre 2015 et 2016, respectivement 5 %, 12 % et 24 % d’entre eux ont déménagé. Les mobilités répondent en effet avant tout à des contraintes structurelles relatives au statut d’occupation. Les propriétaires doivent faire face à des procédures de vente longues, ce qui peut se révéler être un frein à la mobilité résidentielle. Les locataires du parc social doivent, lorsqu’ils désirent accéder à un autre logement, respecter des procédures d’attribution des logements pouvant privilégier d’autres ménages, notamment dans l’objectif d’un accroissement de la mixité sociale. Or, puisque près des trois quarts des habitants des QPV vivent en logement social, leur mobilité résidentielle est moins forte que celle des locataires du parc privé.

Dans six déménagements sur dix, les habitants quittent les QPV

Dans la majorité des déménagements depuis un QPV de la région, soit dans six cas sur dix, la destination est un logement qui ne se situe pas dans un QPV. Les individus concernés privilégient principalement la proximité géographique. Les environnements urbains sont alors la première destination. Les autres déménagements se font entre QPV (quatre cas sur dix), essentiellement au sein du même QPV (figure 2). Ce type de mobilité, plus encore dans le même quartier, répond toutefois à des logiques difficiles à appréhender, pouvant être la conséquence de relogements dans le cadre d’opérations de renouvellement urbain.

Figure 243 % des habitants des QPV ont déménagé dans l’environnement urbainDestination des individus déménageant d’un QPV d’Auvergne-Rhône-Alpes entre 2015 et 2016 selon la typologie « cadre de vie » de l’ONPV

(en %)
43 % des habitants des QPV ont déménagé dans l’environnement urbain ((en %))
Hors QPV hors unité urbaine Hors QPV autre unité urbaine Environnement urbain Même QPV Autre QPV même unité urbaine Autre QPV autre unité urbaine
Tous QPV 9 9 43 30 6 3
Centres anciens 12 13 44 24 5 2
Quartiers HLM de petites unités urbaines 13 12 38 31 3 3
Quartiers périphériques de petites adresses 12 12 40 26 8 2
Quartiers HLM périphériques 6 8 48 27 8 3
Quartiers HLM de banlieues éloignées 5 6 43 37 7 2
  • Note de lecture : en 2015, 24 % des déménagements depuis un QPV de type centres anciens se sont faits vers le même QPV.
  • Champ : les mobilités avec l’étranger ne sont pas retenues.
  • Source : Insee, Fichier démographique des logements et des individus 2016 (Fidéli)

Figure 243 % des habitants des QPV ont déménagé dans l’environnement urbainDestination des individus déménageant d’un QPV d’Auvergne-Rhône-Alpes entre 2015 et 2016 selon la typologie « cadre de vie » de l’ONPV

  • Note de lecture : en 2015, 24 % des déménagements depuis un QPV de type centres anciens se sont faits vers le même QPV.
  • Champ : les mobilités avec l’étranger ne sont pas retenues.
  • Source : Insee, Fichier démographique des logements et des individus 2016 (Fidéli)

Les déménagements depuis les QPV de la région se font donc à courte distance. En particulier, 79 % des habitants réemménagent dans la même unité urbaine. Ce taux est plus élevé qu’à l’échelle de l’ensemble des unités urbaines englobant des QPV d’Auvergne- Rhône-Alpes, où 68 % des mobilités ont lieu au sein de la même unité urbaine. En effet, rejoindre l’espace périurbain est plus fréquent pour les cadres, les professions intellectuelles supérieures et les chefs d’entreprise, catégories sociales moins représentées dans les QPV que dans l’ensemble de la région (9 % contre 13 %).

Bien que la sortie des QPV reste majoritaire, des nuances se dessinent selon le type de quartier considéré (définitions). Ainsi, les habitants des centres anciens, tels que les quartiers Coeur d’Agglo à Vichy ou Tarentaize Beaubrun à Saint-Étienne, déménagent davantage (+ 4,2 points), et pour rejoindre plus fréquemment un quartier hors des QPV. Ce constat tient en partie au fait que les centres anciens s’insèrent dans des ensembles urbains ne comptant que peu d’autres QPV alentour, restreignant mécaniquement les mobilités entre QPV. A contrario, dans les quartiers HLM de banlieues éloignées, tels ceux des Minguettes- Clochettes à Vénissieux et Grande Île à Vaulx-en-Velin, les déménagements ont plus souvent pour destination le même QPV. En effet, ces QPV sont nettement plus peuplés que la moyenne (3 500 habitants contre 2 800). Ils sont éloignés des centres de leurs unités urbaines et comportent une forte implantation du parc social, contribuant à retenir les mobilités.

La disparité départementale d’implantation des QPV conditionne la sortie de l’environnement de la géographie prioritaire. Ainsi, comptant peu de QPV (13 sur les 140 de la région), le Cantal, la Haute‑Loire, la Savoie et la Haute‑Savoie ont des sortants de leurs QPV plus nombreux à rejoindre un quartier qui ne l’est pas. À l’inverse, dans le Rhône, l’Isère, la Loire et la Drôme, qui concentrent 7 QPV sur 10 dans la région, les habitants déménageant depuis un QPV y restent davantage.

L’habitat social au coeur des mobilités

De par la forte concentration de logements HLM dans les QPV, s’y installer permet, pour la majorité des individus, d’entrer en logement social. Pour 37 % d’entre eux, il s’agit d’une accession, le domicile quitté appartenant au parc privé (location ou propriété). Pour 23 %, cela permet de conserver un logement conventionné (figure 3). Le logement social est donc la destination dans 60 % des cas lorsque l’on rejoint un QPV alors que pour un déménagement au sein des environnements urbains, il n’en représente que 14 %. Pour autant, cette proportion parmi les entrants reste inférieure à celle des habitants des QPV vivant déjà dans ce type de logement (76 %). Ainsi, les habitants d’un QPV résident donc plus fréquemment en logement social que les nouveaux arrivants. Cette moindre représentation des locataires du parc social parmi les entrants en QPV pourrait être de nature à accroître la diversité sociale au sein des quartiers.

Figure 3Près de 2 sorties de QPV sur 5 se font à destination du parc socialRépartition des statuts d’occupation parmi les différents types de mobilité entre 2015 et 2016

(en %)
Près de 2 sorties de QPV sur 5 se font à destination du parc social ((en %))
Hors parc social Entrée en logement social Maintien en logement social Sortie de logement social
Mobilité hors QPV 78 8 6 8
Entrée en QPV 33 37 23 7
Mobilité inter-QPV 12 8 73 7
Sortie de QPV 28 7 30 35
  • Note de lecture : 73 % des mobilités en QPV (distincts ou non) se sont faites depuis un logement social vers un logement social.
  • Source : Insee, Fichier démographique des logements et des individus 2016 (Fidéli)

Figure 3Près de 2 sorties de QPV sur 5 se font à destination du parc socialRépartition des statuts d’occupation parmi les différents types de mobilité entre 2015 et 2016

  • Note de lecture : 73 % des mobilités en QPV (distincts ou non) se sont faites depuis un logement social vers un logement social.
  • Source : Insee, Fichier démographique des logements et des individus 2016 (Fidéli)

Une fois entré dans un logement social, il est plus facile d’y demeurer au déménagement suivant. Les logements sociaux sont davantage occupés par des personnes qui vivaient déjà en QPV. Ainsi, 81 % des réemménagements en QPV ont pour destination un logement social. Enfin, parmi ceux qui quittent les QPV, 37 % vont vivre en logement social et, pour une large majorité, ils étaient déjà locataires du parc social dans leur précédent domicile.

L’interprétation de ces mobilités doit prendre en compte l’influence exercée par les modalités d’attribution des logements sociaux. À cet égard, la mise en oeuvre de la loi du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté devrait avoir à l’avenir une conséquence notable sur la mixité dans les quartiers. En effet, au moins la moitié des attributions de logements en QPV doivent à présent bénéficier au trois quart des ménages au niveau de vie le plus élevé, calculés parmi les demandeurs, pour éviter de concentrer au sein des quartiers des populations financièrement très fragiles.

Les mobilités en QPV, une affaire de jeunes et de familles

Les QPV abritent une population relativement plus jeune que celle vivant dans les environnements urbains. Toutefois, qu’ils habitent ou non dans un quartier prioritaire, les jeunes forment la population la plus concernée par les changements de résidence, que ce soit pour se rapprocher de leur lieu d’études ou pour occuper leur premier emploi. La part des 19 – 26 ans vivant en QPV et qui déménagent est ainsi supérieure de 6 points à celle de l’ensemble des mobilités depuis les QPV. Pour autant, ils sont relativement moins mobiles que leurs homologues vivant en dehors de la géographie prioritaire (19 % contre 21 %). D’une part, le départ du foyer familial n’engendre pas toujours un détachement du foyer fiscal des parents. Ce biais ne permet pas la prise en compte d’un certain nombre d’individus. Et ce phénomène pourrait être accru dans les QPV, de par la difficulté des parents à financer un logement dans le parc privé en dehors des quartiers. D’autre part, la poursuite d’études dans le supérieur est moins fréquente pour les jeunes issus des QPV. Ainsi, seuls 57 % des 15 – 24 ans sont scolarisés contre 66 % dans l’ensemble de la région. Ils sont aussi moins souvent en emploi (24 % en QPV contre 32 % à l’échelle de la région).

D’autres types de ménages, plus souvent présents dans les quartiers, sont aussi impliqués dans une mobilité en provenance ou à destination d’un QPV. La monoparentalité est en particulier plus présente à l’entrée. En effet, 9 % des individus qui emménagent en QPV vivent en famille monoparentale, soit plus que parmi les personnes vivant déjà en QPV (8 %). C’est également davantage qu’au sein des environnements urbains. Seuls 6 % des individus ayant déménagé et réemménagé dans ces espaces vivent en famille monoparentale, soit une proportion identique à celle qu’ils représentent dans ces environnements. Ces mobilités s’accompagnent plus fréquemment d’une entrée en logement social. Ainsi, 82 % des individus vivant en famille monoparentale vivent dans un logement HLM. La monoparentalité, situation de fragilité économique et sociale pouvant nécessiter une mobilité, conduit parfois à se tourner vers un logement peu onéreux, souvent situé dans le parc social. Habiter dans un QPV peut aussi représenter une simple étape du parcours de vie de ces familles. Ainsi, parmi les individus rejoignant les environnements urbains depuis les QPV, la proportion vivant en famille monoparentale redevient identique à celle de ceux qui y vivent déjà.

Les familles nombreuses sont également fortement représentées dans les quartiers prioritaires. Leurs mobilités tendent toutefois à réduire leur nombre au sein des QPV. Lors de l’entrée en QPV, 9 % des individus vivent dans une famille nombreuse, soit moins que parmi les personnes y vivant déjà (12 %). Comme pour la monoparentalité, vivre en famille nombreuse en QPV conduit un peu plus souvent à habiter en logement social. Par conséquent, elles sont plus présentes dans les QPV concentrant une forte part de logements sociaux (quartiers HLM périphériques et quartiers HLM de banlieues éloignées). À l’inverse, les membres de familles nombreuses sont proportionnellement autant à quitter un QPV qu’ils y sont représentés. Ces départs pourraient être contraints par le manque de logements suffisamment grands, les opérations de rénovation urbaine ayant tendance à favoriser des surfaces plus réduites. De plus, ces individus sont surreprésentés par rapport à ceux déménageant dans les environnements urbains où ils ne sont que 5 %.

Une pauvreté marquée à l’entrée, persistante à la sortie

Les raisons économiques et, en parallèle, l’évolution du niveau de vie, ne sont a priori que peu influentes dans les mobilités. À peine plus de la moitié des entrants en QPV ont vu leur niveau de vie baisser entre 2015 et 2016 quand les autres l’ont vu croître. Le constat est le même parmi les sortants. Seulement 54 % voient leur niveau de vie augmenter et 46 % quittent les QPV alors que leur niveau de vie baisse. Pour ce dernier cas, il faut prendre en considération que quitter la géographie prioritaire ne va pas toujours de pair avec une amélioration des conditions de vie. Certains territoires socialement et économiquement défavorisés peuvent ne pas être situés en QPV, telles que les régions rurales isolées, les poches de pauvreté dans des ensembles plus aisés. Par ailleurs, entre 2015 et 2016, la variation du niveau de vie est identique que l’on rejoigne un QPV ou les environnements urbains.

La pauvreté monétaire, en revanche, est déterminante à l’entrée en QPV. Quatre entrants sur dix vivent sous le seuil de pauvreté (1 026 euros par mois pour une personne seule en 2016 en France métropolitaine), une proportion identique à celle des résidents en QPV, mais bien supérieure au taux de pauvreté régional (12,7 %). Plus précisément, 16 % sont entrés en pauvreté durant l’année de leur mobilité, et 25 % l’étaient déjà (figure 4). Les quartiers attirent ainsi les populations les plus fragiles économiquement. À la sortie des QPV, la pauvreté reste présente, mais dans une moindre mesure. Parmi ceux qui déménagent, 32 % vivent en‑dessous du seuil de pauvreté. Dans le détail, 21 % sont demeurés pauvres et 11 % le sont devenus l’année de leur départ du QPV. Au final, seuls 12 % ont quitté la pauvreté en même temps que le QPV, soit une prévalence des situations de pauvreté plus importante que dans l’environnement urbain (11 %).

Figure 4La pauvreté touche près de 4 entrants en QPV sur 10Situation des individus ayant déménagé relativement à la pauvreté

(en %)
La pauvreté touche près de 4 entrants en QPV sur 10 ((en %))
Jamais pauvres Nouveaux pauvres Demeurant pauvres Anciens pauvres
Arrivants en QPV 48 16 25 11
Sortants des QPV 56 11 21 12
Mobilités hors QPV 80 7 7 6
  • Note de lecture : entre 2015 et 2016, parmi les sortants de QPV, 11 % sont entrés dans la pauvreté.
  • Source : Insee, Fichier démographique des logements et des individus 2016 (Fidéli)

Figure 4La pauvreté touche près de 4 entrants en QPV sur 10Situation des individus ayant déménagé relativement à la pauvreté

  • Note de lecture : entre 2015 et 2016, parmi les sortants de QPV, 11 % sont entrés dans la pauvreté.
  • Source : Insee, Fichier démographique des logements et des individus 2016 (Fidéli)

Sortir du QPV, alors que la situation économique du foyer semble s’aggraver, peut s’expliquer en partie par l’arrivée d’enfants au sein de la famille. Cet ajout réduit mathématiquement le niveau de vie du foyer, et peut donc, par effet de seuil, placer le ménage en situation de pauvreté monétaire. Par ailleurs, le choix d’un établissement scolaire différent de l’offre disponible au sein des QPV peut conduire les ménages à déménager. Enfin, les opérations de rénovation urbaine visant à améliorer les logements, entraînent parfois une augmentation des loyers difficilement soutenable pour les locataires les plus démunis, les contraignant à quitter la géographie prioritaire. Dès lors, malgré des sortants de QPV relativement moins concernés par la pauvreté que les entrants, les taux de pauvreté dans les quartiers restent constants sur la période (41 % en 2015, 42 % en 2016).

Des mobilités qui appauvrissent les quartiers

Bien que s’insérant dans des environnements urbains au niveau de vie médian en légère croissance (23 000 euros en 2016 contre 22 600 euros en 2015), les QPV voient le leur stagner (13 600 euros en 2015 et 2016). Ces quartiers concentrent par définition une population plus pauvre, et donc au niveau de vie plus faible. Pour autant, ils ne bénéficient pas de la croissance globale que l’on constate dans leurs environnements urbains.

La pauvreté dans les QPV aurait ainsi tendance à s’enliser par le jeu des migrations. Ces quartiers accueillent majoritairement une population plus pauvre que la population y résidant déjà, et laissent, dans le même temps, partir une population plus aisée (61 QPV sur 140). Ainsi, dans les deux tiers des QPV, les nouveaux arrivants affichent un niveau de vie (12 600 euros) inférieur à celui de la population résidente (13 600 euros). Dans un nombre similaire de quartiers, le niveau de vie des sortants est plus élevé que celui des habitants, atteignant 14 600 euros contre 13 600 euros. De plus, 57 % des individus sortant d’un QPV n’ont jamais été pauvres entre 2015 et 2016, alors que ce n’est le cas que de 49 % des entrants. Et lorsque les mobilités ont lieu entre QPV différents, elles se font dans deux cas sur trois vers un QPV au taux de pauvreté plus élevé.

Ce phénomène est toutefois à relativiser et interpréter avec précaution. D’une part, les déménagements ne sont observés que sur une seule année entre 2015 et 2016. D’autre part, il n’est pas possible de savoir si les partants plus aisés sont précisément d’anciens entrants arrivés plus pauvres, ou au contraire si un phénomène de paupérisation du quartier ferait partir des individus étant arrivés avec un niveau de vie proche du niveau de vie du quartier, voire supérieur. Enfin, les politiques publiques menées dans les QPV dans le cadre des contrats de ville 2014-2020 pourraient être de nature à faire évoluer ces constats.

Le mot du partenaire

L’un des enjeux majeurs de la politique de la ville est d’accroître la mixité sociale dans et hors de ces quartiers, afin de réduire la ségrégation spatiale et sociale. S’interroger sur la mobilité résidentielle des habitants dans ces territoires, c’est d’abord poser un diagnostic le plus précis possible sur les évolutions des parcours résidentiels des habitants.

Cette étude réalisée par l’Insee nous éclaire sur une série d’indicateurs susceptibles d’orienter les choix des politiques publiques d’intervention au sein de ces quartiers et d’appuyer l’évolution des contrats ville au-delà de la période 2014/2020. Il parait opportun d’associer ces constats à une réflexion plus globale sur nos politiques publiques en direction des habitants de ces quartiers et plus particulièrement des ménages et des jeunes.

Le logement, avec l’emploi et l’éducation, constituent les trois préoccupations majeures de l’État inscrites dans son plan de mobilisation nationale pour les habitants des quartiers populaires. Agir en proximité et en partenariat est une nécessité pour mettre en œuvre l’ensemble des actions et dispositifs qui garantissent les mêmes droits aux habitants. Ainsi, 52 établissements publics de coopération intercommunale d’Auvergne-Rhône-Alpes sont concernés par la mise en œuvre de la réforme des attributions de logements sociaux engagée avec la loi Alur et confortée par les lois Égalité et citoyenneté et Élan.

Enfin, cette étude amène aussi une nouvelle question : « quel impact du renouvellement urbain engagé depuis plus de 10 ans peut-on observer sur la mobilité résidentielle des habitants des quartiers transformés ? ».

Direction régionale et départementale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Auvergne-Rhône-Alpes

Pour comprendre

Sources et définitions

Le Fichier démographique sur les logements et les individus (Fidéli) contient des informations sur le logement et la composition familiale des individus assujettis à la taxe d’habitation et/ou à l’impôt sur le revenu. Ces données sur les personnes appartenant à des ménages fiscaux ne sont disponibles que sur deux années consécutives. Les habitants et les logements suivis dans cette étude sont ceux présents durant les deux années 2015 et 2016 (hors échanges avec l’étranger). Cette approche fiscale des mobilités résidentielles ne permet pas d’appréhender les déménagements sans départ du foyer fiscal d’origine (comme les étudiants ayant quitté le domicile familial mais restant rattachés fiscalement à leurs parents).

Le champ géographique retenu dans cette étude est constitué des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) définis par la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine du 21 février 2014 dite loi Lamy, et des unités urbaines les englobant. L’environnement urbain désigne la partie de l’unité urbaine hormis le territoire du quartier prioritaire. Les habitants de l’environnement urbain sont donc les habitants des autres quartiers de l’unité urbaine englobant les quartiers prioritaires considérés. La typologie des quartiers selon le cadre de vie, établie par l’Observatoire national de la politique de la ville, est une classification fondée sur la morphologie urbaine (qualification du bâti, ancienneté, centralité dans l’espace urbain), les dynamiques du marché du logement, la taille de l’unité urbaine et la part du parc social.

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