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Jean-Marie Marx : "L'objectif de 2 millions de formations en 2022 est accessible"

Avec 400.000 entrées en formation prévues en 2019, le plan d'investissement dans les compétences (PIC) est au rendez-vous des objectifs fixés par le gouvernement, à savoir former en cinq ans un million de demandeurs d'emploi peu ou pas qualifiés et un million de jeunes éloignés du marché du travail. Jean-Marie Marx, haut-commissaire aux compétences et à l'inclusion par l'emploi, détaille auprès de Localtis la mise en œuvre du plan.

Les pactes régionaux pluriannuels signés et tous les appels à projets nationaux en oeuvre. Lancé début 2018, le plan d'investissement dans les compétences (PIC) devrait atteindre ses objectifs, à savoir former en cinq ans un million de demandeurs d'emploi peu ou pas qualifiés et un million de jeunes éloignés du marché du travail. D'après les données communiquées par Jean-Marie Marx, haut-commissaire aux compétences et à l'inclusion par l'emploi auprès de la ministre du Travail, 200.000 personnes sont entrées en formation en 2018, et "nous en serons à 400.000, voire un peu plus, en 2019, et 450.000 l'an prochain, soit un objectif de 2 millions d'ici 2022 accessible". Et les cibles visées sont respectées, avec un taux de 22% de personnes formées issues des zones de revitalisation rurale (ZRR) et 14% issues des quartiers prioritaires de la politique de la ville.
Pour ce faire, l'État a signé avec les régions des pactes régionaux d'investissements dans les compétences, après une période d'amorçage en 2018. Il a également mis en place des appels à projets nationaux et lancé ou intensifié des actions nationales orientées dans l'accompagnement dans l'emploi des publics fragiles

18 pactes régionaux d'investissement dans les compétences signés

Côté régions, toutes n'ont pas souhaité se lancer, car la condition pour signer ces pactes était que chaque région s'engage à maintenir ses efforts budgétaires en matière de formation à la même hauteur que 2017. Les régions Auvergne-Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d'Azur (Paca) n'ont pas accepté le principe, amenant l'État à contractualiser directement avec Pôle emploi, sans compenser la baisse des dépenses de formation. Pour l'Auvergne-Rhône-Alpes, une baisse de 60% des entrées en formation pour les publics ciblés par le PIC a été identifiée. "Et comme il n'y a pas de pacte avec le conseil régional, cette baisse se poursuit en 2019, explique à Localtis Jean-Marie Marx, au détriment de l'accès à la formation pour les personnes les plus éloignées de l'emploi."
Ces pactes comprennent une partie de diagnostic des forces et faiblesses du territoire notamment en matière d'accès des publics fragiles à la formation, et définissent des réponses adaptées aux besoins de ce territoire. Ils prévoient un engagement de l'État contractualisé sur quatre ans, qui s'additionne à l'effort propre de chaque région.
Le PIC est ainsi doté de 15 milliards d'euros jusqu'à 2022, dont 13,8 milliards sous la responsabilité du ministère du Travail. Plus de la moitié de cette enveloppe est répartie région par région, au prorata de la part des populations ciblées qui y habitent.

Des moyens importants même pour les deux régions non signataires

Parmi les régions qui ont directement signé avec l'État, le pacte de Bourgogne-Franche-Comté, par exemple, est doté d'un peu plus de 250 millions d'euros de la part de l'État. Une somme qui s'ajoute aux 333 millions d'euros que la région s'est engagée en retour à mettre sur la table jusqu'en 2022. Le total devrait financer près de 30.000 formations supplémentaires destinées aux 108.436 personnes non qualifiées en recherche d’emploi de la région. Autre exemple : les Hauts-de-France, dont le pacte est doté de 745 millions d'euros côté État et de 795 millions côté région, pour un nombre d'entrées prévisionnelles de 52.000 sur la période.
En Auvergne-Rhône-Alpes, les moyens mis à disposition par l'État s'élèvent à 652 millions d'euros. Ils viendront compléter le maintien du budget socle de Pôle emploi consacré à la formation, soit 191,2 millions d'euros sur la durée du pacte, pour financer quelque 109.090 parcours. En Paca, autre région non signataire, le montant investi par l'État correspond à 534 millions d'euros, en complément des financements de droit commun des différents acteurs tels que Pôle emploi, les partenaires sociaux ou la Direccte. Des sommes, qui pour ces deux régions non signataires "restent très importantes globalement", tient à souligner Jean-Marie Marx.

L'ensemble des appels à projets nationaux lancés, 150 projets retenus

Au niveau des appels à projets, les choses vont également bon train. L'ensemble de ces appels à projets, dont les thématiques sont diverses (inclusion, prépa-apprentissage, intégration professionnelle des réfugiés) a été lancé. "Nous avons retenu 150 projets sur près d'un millier de porteurs de projets et 700 à 800 structures impliquées", détaille le haut-commissaire. Des appels à projets qui doivent permettre de donner la main aux acteurs locaux et de les aider à pérenniser par la suite leurs actions (les dossiers sont instruits par la DGEFP et la Caisse des Dépôts, avant passage devant un comité de bénéficiaires puis un comité de sélection indépendant). "Chaque projet va être suivi pour pouvoir monter en puissance et viser la pérennisation, détaille Jean-Marie Marx. Ces appels à projets, qui  représentent 600 millions d'euros au total, soit 10% du PIC, nous permettent aussi de repérer les pépites, les innovations avec la possibilité de lever les freins qui les empêchent de se développer et de les essaimer ailleurs ; nous pouvons par exemple imaginer de lancer une expérimentation nationale sur un des projets très développés." Une autre façon de fonctionner avec les acteurs locaux que le haut-commissaire pense très prometteuse.
L'idée de fixer des budgets dans le temps, les conventions signées avec les porteurs de projets étant pluriannuelles, facilite aussi le travail. Les plans formation lancés auparavant ne permettaient pas cette projection dans l'avenir, étant limités à une année. D'autres vagues de sélection sont prévues pour ces appels à projets nationaux.

100.000 bénéficiaires de la garantie jeunes par an depuis 2019

Parallèlement, l'État intensifie les actions nationales destinées à accompagner les publics fragiles vers l'emploi et à accélérer les transformations. Pour les demandeurs d'emploi, cela se traduit notamment par le financement de 10.000 formations aux métiers du numérique, une priorité donnée dans le cadre des actions de préparation opérationnelle à l'emploi destinées aux demandeurs d'emploi aux métiers verts, et plus de 30.000 préparations opérationnelles à l'emploi collectives (POEC) financées en 2018. Un effort qui sera poursuivi et amplifié d'ici 2022. Pour les jeunes, l'extension de la garantie jeunes (avec 100.000 bénéficiaires par an depuis 2019), le développement des écoles de la deuxième chance ou encore le développement de l'Epide - établissement pour l'insertion dans l'emploi qui accueille des jeunes en grande difficulté d'insertion pour les aider à construire leur projet de vie et à entrer sur le marché du travail - devraient changer la donne.

Si les signaux du PIC sont au vert, une annonce de la ministre du Travail, la semaine dernière, est venue jeter le trouble. Pour compenser l'abandon de la suppression d'une exonération sociale sur l'emploi à domicile pour les plus de 70 ans, Muriel Pénicaud a prévu une économie de 120 millions d'euros sur le budget du PIC en 2020. "Compte tenu de son caractère pluriannuel [du PIC, ndlr], le léger retard pris sur certains projets permet de décaler le lancement de certaines formations du dernier trimestre 2020 au premier trimestre 2021, permettant de réaliser les économies sans pénaliser la formation et les demandeurs d'emplois", a-t-elle justifié mardi 29 octobre, aux députés lors de l'examen du budget en commission des Affaires sociales. Un amendement est attendu en ce sens.

3 milliards d'euros pour le plan d'investissement dans les compétences en 2019

L'arrêté du 28 octobre 2019, publié au Journal officiel du 31 octobre, ouvre des crédits de paiement de fonds de concours, dont 1,532 milliard d'euros au profit du ministère du Travail, pour son programme budgétaire intitulé "Accompagnement des mutations économiques". Ce versement est prélevé sur la trésorerie de France compétences. Prévu par la loi de finances initiale 2019, il doit permettre de financer les actions de la deuxième année de mise en œuvre du plan d'investissement dans les compétences (PIC). Il vient en complément des fonds apportés par l'État, sur le budget du ministère du Travail, à hauteur de 1,532 milliard d'euros. Au total, en 2019, le PIC bénéficie donc de 3 milliards d'euros.

Références : Arrêté du 28 octobre 2019 portant ouverture de crédits de fonds de concours publié au Journal officiel du 31 octobre 2019.