Le programme "Territoire engagé transition écologique" de l'Ademe gagne  petit à petit du terrain

Au cours des Assises européennes de la transition énergétique, plusieurs collectivités engagées dans le programme de l’Ademe "Territoire engagé transition écologique" sont venues partager leurs expériences de cette démarche de longue haleine, stimulante mais non dénuée de difficultés.

Les Assises européennes de la transition écologique, qui se sont tenues dans le Grand Genève du 31 mai au 2 juin, ont été l’occasion de faire le point sur le déploiement du nouveau programme de l’Ademe "Territoire engagé transition écologique", destiné aux communes et EPCI. Ce dernier intègre les anciens labels Cit’ergie et Économie circulaire, qui forment désormais chacun l’un des deux "parcours" proposés dans ce cadre (voir notre article du 16 septembre 2021). Éric Vésine, responsable du service animation territoriale de l’Ademe, insiste sur le fait qu’il ne s’agit plus simplement d’un label, mais d’un véritable "programme d’accompagnement personnalisé, adapté au territoire", l’objectif étant de se placer dans une "démarche d’amélioration continue". Preuve que la "transition" écologique porte décidément mal son nom (voir notre article du 2 juin), puisqu’elle semble être davantage un voyage qu’une destination. D’autant plus quand cette dernière reste mal cernée… (voir notre article du 5 novembre 2021).

331 collectivités engagées

Présentant la carte des collectivités engagées dans le programme, Éric Vésine relève qu’elle "est de moins en moins lisible. C’est plutôt bon signe !". 331 collectivités étaient inscrites en mai à au moins l’un des deux parcours (15 l’étant dans les deux). La très grande majorité – 311 – s'est engagée dans le parcours climat-air-énergie. À gros traits, la moitié d’entre elles ont déjà franchi au moins l’un des cinq paliers du label, neuf atteignant le niveau 5 étoiles (ex. Cit'ergie gold), qui acte l’atteinte de 75% des objectifs : les villes de Besançon, Brest, Échirolles, Grenoble, Nantes et Lorient, la communauté urbaine de Dunkerque et les métropoles de Brest et de Nantes. En revanche, seules 35 collectivités sont engagées dans le parcours Économie circulaire – les lauréates du premier palier attribué en juillet 2021, sans changement donc.

Facteurs clés de succès

Quatre collectivités impliquées étaient invitées à témoigner de leur expérience et réalisations. De leurs exposés, Éric Vésine a tiré plusieurs "facteurs de réussite" de la démarche : respecter l’identité du territoire – d’où l’importance, au-delà des référentiels communs du programme, des mesures complémentaires "sur-mesure" –, savoir mobiliser en interne, créer du lien et coopérer, mutualiser les démarches, être coaché, avoir de l’ambition, de la volonté et de la fierté – tout en restant humble, avertit Jérôme Baron, vice-président de l’agglomération du Bocage Bressuirais –, rendre visible ce qui est fait, s’évaluer ou encore savoir identifier ses faiblesses. Philippe Guelpa-Bonaro, vice-président de la métropole du Grand Lyon, préconise, lui, de rendre la sobriété "heureuse, festive, de la 'gamifier'" (d’en faire un jeu, ndlr). "Je ne me suis jamais senti aussi libre depuis que j’ai renoncé à la voiture", se réjouit-t-il d’ailleurs, expliquant que, finalement, "on peut facilement bouger sans voiture". À Lyon, sans doute. Aurélie Kossman insiste pour sa part sur l’importance de "l’accessibilité pour tous et de ne pas creuser les écarts", rejointe ici tant par Sandrine Lucarini Raymond, vice-présidente de la communauté d’agglomération Ventoux-Comtat Venaissin – qui rappelle "le contexte social très fragile" –, que par Maurice Gironcel, président de la communauté intercommunale du Nord de la Réunion.

Chausse-trappes

Autre facteur clé de succès identifié, traiter "l’ensemble du champ de la transition". Une nécessité même, selon moult intervenants de ces assises. Jérôme Baron souligne que c’est le principal changement opéré avec la nouvelle démarche : "La transition écologique est désormais pour nous un objectif à part entière, et plus un dossier parmi d’autres." Elle n’en reste pas moins difficile à mettre en œuvre. Aurélie Kosman, conseillère déléguée à l’exemplarité en matière de transition écologique à la ville et à l’eurométropole de Strasbourg, la place même en tête des difficultés rencontrées. Pour Jérôme Baron, le principal obstacle serait plutôt budgétaire : "Notre capacité à financer et investir dans les projets structurants est limitée. On a du mal à faire des arbitrages." D’autres difficultés concrètes ont encore été avancées, comme celle de recruter du personnel qualifié – ou du personnel tout court – dans plusieurs filières, singulièrement celle du bâtiment. Un constat désormais récurrent (voir notre article du 10 mars). "L’échelon régional doit agir de manière beaucoup plus volontariste", préconisait la veille, lors d’une autre table-ronde, Claudine Bichet, vice-présidente de Bordeaux Métropole.

Des PCAET qui font encore défaut 

La route, pour être agréable et stimulante, à en croire les témoignages, n’en est donc pas moins semée d’embûches. Ce qui conduit peut-être certains à ne pas l’emprunter. Lors de la présentation du programme, l’Ademe avait indiqué que l’objectif de ce dernier était d’aller plus loin que le seul cadre réglementaire fixé par le plan climat-air-énergie territorial (PCAET). Or, dans une autre session des assises, Nicolas Garnier, délégué général d’Amorce, relevait que cette première étape restait encore à franchir pour nombre de collectivités : "Les PCAET, il faut les faire ! Aujourd’hui, moins de la moitié ont été mis en place. On s’est arrêté en cours de route faute de financements (voir notre article du 11 mars 2019). Mais il faut les adopter, même si on n’a pas encore les financements." Un sujet sensible, qui anime d’ailleurs régulièrement ces assises… (voir notre article du 19 février 2019). Pour l’heure, le vœu d’une sortie rapide du "cercle des pionniers pour massifier les pratiques", formé l’an passé lors de la Semaine de la ville durable par Stéphanie Dupuy-Lyon, directrice générale de l’aménagement, du logement et de la nature au ministère de la Transition écologique (voir notre article du 20 mars 2021), semble donc encore — en partie — à exaucer.